Quelle rénovation énergétique pour le bâti ancien ?
Le 22 avril dernier, notre association organisait un Café patrimoine avec l’architecte Laurent Alfonso Lo Monaco, fondateur de l’agence LALM, sur le thème : « Patrimoine ordinaire, pathologies et rénovation énergétique : évolutions passées et à venir du bâti parisien ». La discussion était animée par l’architecte Claire Monod.
La rénovation énergétique des bâtiments anciens est une conséquence directe de leur hygiénisation tout au long du XXe siècle, en particulier avec l’introduction de l’eau courante et de l’électricité. C’est en effet en 1913 que la Ville de Paris commença à équiper les maisons en eau, la salle de bains – très moquée à ses débuts – prenant peu à peu une place centrale. Ce processus fut très lent puisque ce n’est que depuis les années 2000 que la totalité des habitations parisiennes sont équipées de salles de bain. On installa progressivement des ventilations, des addictions et des évacuations, alors que les deux tiers du bâti parisien n’étaient pas conçus pour recevoir de l’eau et de l’électricité. Des pathologies apparurent progressivement, causées par une généralisation de l’humidité, celle-ci étant aggravée à partir des années 1950 par l’introduction du béton qui étanchéifie les façades et contribue au pourrissement des éléments en bois.
Aujourd’hui, les pathologies affectant le bâti ancien sont bien identifiées – champignons, insectes, gonflement des matériaux, etc. –, aggravées par l’insuffisance des ventilations et des évacuations. Il se révèle donc indispensable, dans chaque immeuble ancien, de mettre en commun les équipements pour centraliser les ventilations, la plupart des copropriétés n’étant cependant pas sensibilisées à cette nécessité. Ainsi la pose de fenêtres étanches par de nombreux particuliers, sans ventilation suffisante, piège-t-elle l’humidité à l’intérieur des appartements et aggrave-t-elle les problèmes de structure des immeubles, d’où l’opportunité de conserver les conduits de cheminée et de mettre en place une charte de bonne pratique des matériaux dans chaque copropriété.
Un exemple emblématique de bonne rénovation énergétique est celui de l’immeuble situé au n° 82 rue Marguerite-de-Rochechouart (9e arrondissement). Datant de 1841, le bâtiment s’était beaucoup dégradé au fil du temps, avec des fissures sur les façades, une humidité importante, des problèmes de structure, l’absence de ventilation générale, des pertes de chauffage et une sécurité électrique insuffisante, le tout aggravé par des rebouchages en béton et des revêtements peu adaptés.
Fut d’abord lancée une phase de diagnostic pour trouver des solutions techniques valables sur le long terme. Les choix techniques se portèrent sur une isolation thermique par l’extérieur en liège, une ventilation permanente de toutes les pièces d’eau afin d’assurer la suppression de l’humidité, l’optimisation du chauffage pour limiter les pertes et l’isolation des combles, sans que ces dispositifs ne portent atteinte à l’esthétique du bâtiment. Les travaux débutèrent par le traitement de tous les problèmes de structure pour pouvoir supporter l’isolant, avec la purge de tous les revêtements au moyen d’une peinture au plomb ainsi que la réparation ou le remplacement des bois endommagés par l’humidité. Débuta ensuite la phase d’isolation, avec la pose d’un nouveau matériau de façade en liège, particulièrement adapté aux bâtiments en pan de bois et mortier. La façade conserva son aspect initial car les éléments de décor furent reconstitués, rendant les isolants invisibles.
Toujours dans le 9e arrondissement, de nombreux chantiers de rénovation énergétique de bâtiments anciens se sont récemment déroulés, comme au n° 42 rue Condorcet ou au n° 25 rue Jean-Baptiste-Pigalle. Il faut donc souhaiter que ces différentes opérations, respectueuses du patrimoine, puissent faire école dans les prochaines années.